"Caelum non animum mutant qui trans mare currunt"

18 de abril de 2012

▪ Why do we Write?



UNE POÉTIQUE EN MIETTES

Encore écrire sur l'écrire? Pourquoi, alors que je ne sais pas? Peut-être pour cette raison même. Certains critiques, eux, ont l'air de savoir. Ils disent: poètes du pays, de la ville; ou bien: poètes de l'eau, de la mélancolie, que sais-je encore. Je ne sais pas. Quand l'amour, avec un air de mourir, est venu décolorer ton visage, alors, oui, j'ai su. Me demander maintenant: ce que j'écris, est-ce ou non poésie? peu m'importe. La seule chose évidente, c'est que la poésie m'apparaît rigoureusement inutilisable. Et que les arbres ne sont jamais si beaux qu'en hiver; dans leur dénuement, ils font corps avec le ciel qu'ils soutiennent — et couvrent d'une écriture tremblée.

Écrire, inscrire de la matière dans la matière. Et le corps, vraiment, s’y désâme. S’attarde un petit brin de vie sous le clair-obscur des jours et des nuits, il y a si longtemps, et c’est si vague, mais cela serre encore le coeur. Un mot banal, une locution familière, comme des objets trouvés sur le trottoir auprès des poubelles trop pleines, voilà qui toujours m’étonne. Je me sens bien dans nos lieux communs. C’est au fond du quotidien que gît le merveilleux. Il y en a qui se consacrent aux grandes choses — et je les admire; il y en a qui s’accordent avec les petites choses — et je les aime. L’errance de l’eau, la rue où le temps mène sa flânerie, le clochard caché en chacun, la patience illuminée d’un mur, voilà des fils conducteurs et que je touche de la main. Pour aller où?

Trois fois passera, Jacques Brault
 
 
 

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